La voix de la jeune femme était perçante, presque insupportable. Je la tenais à distance de son mari en tâchant d’éviter ses coups d’ongles mais elle se débattait comme une furie pour tenter de l’atteindre. Je commençais sérieusement à envisager l’idée de lui passer les menottes mais...

Pour comprendre, il me faut revenir quelques minutes en arrière, quand une voix terrifié cria “A l’aide !”. Naturellement, j’accourais, l’arme presque déjà sortie. Je passais le buisson qui me cachait la vue pour voir un homme se protéger la tête des coups de sacs d’une femme enragée. Elle lui criait des

“Comment as tu oser ! Nos noces de Corayons ! Tu aurais pu m’emmener en mer ! Espéce de…”
Et même après que je me sois interposé - en me demandant franchement si c’était une bonne idée - elle ne s’était pas arrêtée.

L’homme derrière moi enchaînait les plates excuses, lui promettant mille merveille pour se faire pardonner. Et après une trentaine de seconde qui me parurent une éternité, sous les yeux médusés et amusés des passants, la promesse d’une repas en tête à tête au Magicarpe d’Or finit par la calmer.
Elle se détendit d’un coup et revint roucouler dans les bras de son mari.

J’aurais sans doute pu la poursuivre pour trouble à l’ordre public, ou outrage à agent, mais je n’espérais qu’une chose : filer d’ici et les laisser à leur querelle d’amoureux.

A grandes enjambés, je rejoignais la sortie du parc, activant au passage le pokestop.